Jan Ladislav Dussek (1760-1812)
Sonate pour piano en mi bémol majeur, op. 44, Craw 178 "The Farewell"
Sonate pour piano en fa mineur, op. 77, Craw 259 "L'Invocation"

Alexei Lubimov, pianoforte

Kuijken s’était arrêté en 1799, Lubimov nous amène jusqu’à la mort de Dussek avec deux morceaux de choix : « the Farewell » et « l’Invocation ». Lors d’un séminaire d’IReMUS à l’abbaye de Royaumont en 2016 (auquel participait Lubimov, justement), le style du compositeur avait été qualifié de « pianisme d’avant-garde » : en voici une belle démonstration. Dans l’op. 44, ce n’est pas seulement à son ami Clementi que Dussek dit adieu… il semble aussi prendre congé des multiples influences musicales qui façonnèrent son style au cours de ses pérégrinations européennes. Le programme le sous-entend, enchaînant à l’extraordinaire conclusion du rondeau la dernière œuvre d’un musicien de 52 ans à l’inspiration tournée vers l’avenir. Si « l’Invocation » est destinée aux dieux de la musique, alors c’est à leurs avatars futurs : Chopin et Schumann à peine nés, ou Brahms engendré 20 ans plus tard ! Mais est-ce si sûr ? Ne faudrait-il pas plutôt chercher la raison du titre et des nombreux changements d’affect du côté de la dédicataire (« Betsy » Ouvrard serait-elle Elizabeth, première fille alors âgée de 16 ans d’un immensément riche et sulfureux fournisseur-banquier du Directoire et de l’Empire, et musicienne à ses heures) ? A l’irrésistible flux fluide et bondissant de Firkusny sur instrument moderne, Lubimov oppose un style musclé plus sensible au détail qu’à la forme d’ensemble : deux visions à connaître qui montrent à quel point Dussek a autrefois été injustement sous-estimé. Cette intégrale continue d’être passionnante, vivement le volume 4 ! (Olivier Eterradossi)

One of the great Russian pianists of our time in a new studio recording of sparkling sonatas by a contemporary of Beethoven. Alexei Lubimov has long been renowned for his beautifully weighted and persuasive performances of new music, especially from his native Russia, by post-Soviet composers such as Sofia Gubaidulina, Alfred Schnittke and Valentin Silvestrov. He is a restless seeker after beauty in music wherever it may be found, equally at home in music as diverse as Chopin, Debussy, Pärt and Cage. His interest in historically relevant instruments for historical repertoire stretches back decades to a time, especially in the Soviet Union, when such an interest was unusual and even eccentric to some, but Lubimov has always been a pianist of profound integrity who goes his own way without regard to passing fashions. It is in this capacity, as a fortepianist, that Lubimov has made a distinguished contribution to the ongoing Brilliant Classics series dedicated to the complete sonatas of Jan Ladislav Dussek. As he writes in a characteristically illiuminating booklet essay, the two sonatas Op.44 and Op.77 belong to the mature and most original of Dussek’s works. Composed in 1799, Op.44 is a truly fin-de-siècle work, not coincidentally subtitled ‘Farewell’, with bold modulations that cast their gaze forward into a vision of the Romantic age as much as the rhetorical structures belong to the Classical era of Haydn and Mozart. The emotional candour, the romantic impulse and the depressive melancholy in Dussek’s presentiment of his coming death make the Op.77 Sonata (L’Invocation’) an even more entrancing anticipation of the world of Chopin. For a fusion of Baroque gestures, Classical sonata forms, novelty and expression of the melodic contours, the richness of the piano writing and the boldness in the use of all possible resources of the instrument, there’s no-one quite like Dussek, and Alexei Lubimov is a peerless exponent of his expressive world.