Quatre cycles de l’important corpus représenté par la musique pour piano dans l’œuvre de Szymanowski, les Métopes op. 29, les Etudes op. 33, la 3e Sonate et les Danses polonaises. Une pianiste polonaise et spécialiste de la musique de Szymanowski, Joanna Domanska, ayant déjà rencontré un grand succès avec ses précédents enregistrements dédié à ce compositeur. Deux visages de Szymanowski : celui entre fantasmagories sexuelles et héritage romantique que le compositeur entend dévoyer, dichotomie qui crée le grand écart stylistique sensible tout au long des années 1910 jusqu’à la fin de la Grande Guerre, et le quasi cubisme des musiques populaires revisitées qui envahissent sa grammaire à compter de 1925. Joanna Domanska commence chez Eros, son odyssée des Métopes est prodigieuse de danger, piano venin peuplé de monstres sonores, elle ne rougirait pas si on lui comparait Richter et les ponts avec Gaspard de la nuit sont comme éclairés par ce piano à la fois virtuose et visionnaire. Les Etudes op. 33, si bartokiennes, jouées avec des finesses de chat, deviennent autant de gemmes pianistiques, une certaine nostalgie ironique s’y diffuse, réalisée avec un sens des couleurs et des nuances qui en ôte les duretés qu’on y entend trop souvent. Chef d’œuvre, la Troisième Sonate commencée sous l’aile du bizarre et finie par une fugue monumentale où Szymanowski semble étouffer Reger à coup de polyphonies, est réalisée avec une exactitude soufflante. Et les Danses polonaises ? Joanna Domanska ne les joue pas cubistes, préférant y faire entendre des échos de Chopin, belle idée qui rappelle quelle artiste précieuse elle est chez Szymanowski, décidément son compositeur. (Discophilia - Artalinna.com) (Jean-Charles Hoffelé)
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