 En juillet 1988, Nikolaï Petrov (1943-2011) interprétait au Queen Elizabeth Hall de Londres l’adaptation pour piano seul (1871), par Georges Bizet, du 2nd Concerto pour piano de Saint-Saëns. Et ce fut une révélation dont garde trace un glorieux enregistrement (Olympia OCD276). Il est des astres dont la fulgurance traverse le ciel de nos habitudes sans que rien ni personne ne les ait prédits ou prévus. Tel est le cas de Maria Stembolskaya (1974), pianiste venue d’Azerbaïdjan, lauréate en 2003 du Concours Busoni et de bien d’autres prix prestigieux, mais artiste discrète, et même secrète, dont le premier et seul disque jusqu’à maintenant, consacré en 2010 à Mel Bonis (Ligia LIDI 0103214-10), révélait tout le talent. Quelques concerts en France, comme au Festival de Vollore à l’instigation de ce découvreur qu’est Laurent Martin, une résidence à la Société des Interprètes de Cimiez, et le secret était bien gardé. Aujourd’hui un enregistrement absolument époustouflant de musicalité et de virtuosité, au sens où celle-ci combine intelligence, sensibilité, digitalité, doit permettre de reconnaître en elle un incontestable grand talent, non encore spolié de ses dons par la commercialisation. L’adaptation de Saint-Saëns par Bizet renferme toute l’orchestration ainsi que la partie soliste, avec tous leurs timbres, dans l’étendue d’un clavier tour à tour puissant, imposant ou virevoltant et dansant. L’air de Dalila, adapté par Boris Borodin (1932-1993), trouve sous les doigts de Maria Stembolskaya ses plus émouvantes inflexions avec un art affirmé du lyrisme vocal. Les adaptations scintillantes d’Eugene Onegin, par Liszt, tout d’abord, puis par Paul Pabst (1854-1897), confèrent à la musique de Tchaikovski tout son potentiel attractif de fête et simultanément de désillusion et de nostalgie dramatique. À cet égard, bien mieux qu’Oleg Marshew (Danacord DACOCD 450), et à l’égal, sinon plus délicate dentelière encore que Shura Cherkassky (Decca 433 654-2DH), ce qui n’est pas peu dire, Maria Stembolskaya rend brillamment à ces partitions toute leur éloquence, mais aussi — et ce n'est pas rien — toute leur poésie. Un enregistrement remarquable doté d’une parfaite prise de son. Tout est là réuni pour un programme d’exception. (Jacques-Philippe Saint-Gerand) A unique coupling of Romantic-era transcriptions, and a fine showcase for the artistry of an Azeri pianist with a limpid touch and powerful intelligence at the keyboard. In the centenary of his death in 1921, Camille Saint-Saëns is still patronised in some quarters as a prodigiously fluent musician of secondrate gifts. Yet his elders, his contemporaries and his students all esteemed him as an innovator as well as a gifted melodist and supremely disciplined technician in the craft as well as the art of composing. For Berlioz, the only problem with the child prodigy Saint- Saëns was that he knew too much. Ravel declared that he learnt everything he knew about orchestration from scores such as the Second Piano Concerto. Out of the composer’s five piano concertos, the Second has long established itself as the most popular thanks to a unique and winning stylistic progression neatly summed up ‘from Bach to Offenbach’, opening with a monumental cadenza and orchestral response in the manner of a Bachian prelude for organ, and winding up with an exhilarating tarantella. Three years after its composition in 1868, a version for solo piano was made by none other than Georges Bizet, Saint-Saëns’s short-lived contemporary. The arrangement was enthusiastically taken up by the composer, and it sheds valuable light on the essentially pianistic nature of his inspiration (after all, Saint-Saëns could play all of Beethoven’s sonatas from memory by the age of nine). This rarely encountered but fascinating transcription is complemented by ‘Mon coeur s'ouvre à ta voix’, the love-confession sung by Delila in the grand Biblical epic staging the downfall of Samson, in a solo piano version made by the Russian musicologist Boris Borodin. Another of the composer’s greatest admirers was Tchaikovsky, and Maria Stembolskaya adds a pair of piano fantasies inspired by the best-known of his stage works, Eugene Onegin: a free transcription of the third-act Polonaise made by Liszt, and a spectacular paraphrase of the opera’s main themes by one of his most talented students, Paul Pabst. Maria Stembolskaya's playing lends these transcriptions a scale and magnificence worthy of their originals. The intensity of her performances and the variety of her colouristic inflection evokes a powerful sense of the piano as an orchestra in its own right.
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