 C’est assez tard, par le biais du quintette à cordes, que la contrebasse prit son essor comme instrument chambriste. Et Hindemith fut le premier compositeur renommé à lui consacrer une sonate, avec piano. Une complicité subtile s’installe entre les interprètes dans les deux brefs premiers mouvements de cette œuvre, tandis qu’est magnifié l’ample et lent épisode conclusif, à qui elle doit l’intensité de sa charge émotive. La sonate de Gubaidulina, sobre, parfois au bord du silence, se fait plus âpre et animée lorsqu’elle recourt, côté contrebasse, à des techniques telles que glissandi, jeu percussif, frottements… C’est l’opposition entre les deux instruments qui frappe dans ces pages (au contraire d’Hindemith) : "deux chats solitaires qui se traquent" affirme N. de Groot, caractérisant ainsi on ne peut mieux son jeu et celui de la pianiste. Dans la sonate de Vasks, la contrebasse déploie l’ensemble de ses possibilités techniques et expressives, dans un discours qui, sans ostentation, semble recueillir bruissements, rumeurs, vibrations du monde et de la nature, appelant même, pour finir, l’interprète à joindre sa propre voix à celles de l’instrument. L’audace la plus grande de ce cd est peut-être la transcription (sans transposition aucune) de la sonate pour violoncelle et piano op.38 de Brahms : Le résultat (graves plus capiteux, aigus plus clairs et francs) est d’une beauté étonnante. Un disque remarquable, une notice passionnante écrite de bout en bout (en anglais) par le contrebassiste. (Bertrand Abraham)

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