Un melting-pot de styles et de genres, en somme un nouveau genre, dans ce pseudo-opéra des temps modernes, qui mélange tel un Rubik cube le jazz, le folk, la musique classique et populaire, avec des influences du style « Americana », du blues et de l’écriture jazzy style Broadway de Bernstein. Une musique à la fois complexe et directe, ironique et sentimentale, dissonante et ravissante ou bien populaire et branchée, le tout sur le fond des improvisations de l’un des plus influents guitaristes d’aujourd’hui, Bill Frisell.  Amateur d’Otis Spann autant que de Bartok, Ives ou Copland et désireux de composer une œuvre profondément américaine capable de transcender les divisions entre musique savante et populaire, jazz Broadway et musique des Appalaches, le compositeur Wayne Horvitz a choisi de raconter l’histoire emblématique de Joe Hill, syndicaliste, membre des Industrial Workers of the World et lui-même compositeur de chansons, exécuté en 1915 pour un crime dont il était sans doute innocent. Cantate ? Opéra de poche ? Pièce radiophonique ? Ces « 16 actions pour orchestre, voix et soliste » sont volontairement inclassables. Le récit, centré sur la brève visite rendue en prison par Elizabeth Gurley Flynn à Joe Hill peu avant son exécution, est porté par trois voix, dont celle de Robin Holcomb, la femme d’Horvitz, dont le chant fait un peu penser à celui de Lotte Lenya dans les compositions de Kurt Weill. L’œuvre, au sein de laquelle le guitariste Bill Frisell occupe une discrète place soliste, séduit par sa tonalité aventureuse, à la fois élégiaque et automnale, ironique et sentimentale, rayonnante et dissonante, simple et recherchée. (Emmanuel Lacoue-Labarthe)  Sacré melting pot que ce pseudo-opéra en seize tableaux (actions) du compositeur américain Wayne Horvitz (1955-) – il est aussi pianiste et producteur –, actif dans la musique de scène (cinéma, télévision, théâtre et danse) : dans "Joe Hill", il assemble des influences venues du classique, du jazz, du rock, du folk – comme une entente illicite entre musique populaire et avant-garde – et raconte l’histoire de Joseph Hillström, membre du syndicat Industrial "Workers of the World" (radical et parfois violent pourfendeur de la justice sociale), condamné après un procès controversé (le jour du meurtre d’un boucher et de son fils, il se fait soigner pour une blessure par balle dont il refuse obstinément d’expliquer l’origine), au long duquel il nie, sans jamais dévier, toute implication – il n’échappe pas au peloton d’exécution. Elle n’est pas la seule, mais Joan Baez, qui chante "Joe Hill" à Woodstock en 1969, contribue à entretenir la contestation autour de sa mémoire. Ce qui a fasciné Horvitz ? Le mythe, celui qui fait de Joe Hill un nouveau hors-la-loi américain, à la manière de Jesse James, mais dans le siècle de l’industrialisation radieuse. (Bernard Vincken)

|