 J’ai déjà rappelé dans ces colonnes la vie fracassée, anthume et posthume, de Hans Winterberg. La reconnaissance tardive des qualités de sa musique que lui offre le label berlinois EDA n’en est que plus méritée. Aujourd’hui, c’est le pianiste Jonathan Powell — ayant déjà enregistré le premier des quatre concertos pour piano de Winterberg : Capriccio 5476 — qui s’attache à faire découvrir le massif des cinq sonates pour piano que Winterberg composa entre 1936 et 1950, lesquelles ne furent jamais interprétées en public du vivant du compositeur. Brigitte Helbig a, par ailleurs, entamé l’enregistrement chronologique d’une intégrale des œuvres pour piano de Winterberg (Volume 1 : Toccata Classics 0531), tandis que Christophe Sirodeau (Melism MLSCD011) associe la première sonate à des œuvres de Samouïl Feinberg (1890-1962). Comme le suggère Jonathan Powell, dans une abondante notice dressant l’histoire de la sonate pour piano tchèque de Dussek à Haba et Ullmann, ces œuvres sont trop intimement liées aux conditions dramatiques de la vie personnelle du compositeur, dans une époque ayant connu la seconde guerre mondiale et la Shoah, pour prétendre avoir été livrées à une diffusion en concert contrevenant aux principes de pudeur et de rigueur du compositeur. L’interprète propose d’ailleurs de procéder à une audition en continu de ces cinq sonates comme il en est pour les cinq dernières sonates de Beethoven ou Scriabin pour mieux apprécier l’intensité de leur dramatisme, leurs empilements de rythmes brisés sur des silences interrogatifs. L’auditeur est alors plus à même de saisir la singularité d’un langage qui se nourrit d’influences aussi variées que celles de l’impressionnisme français, de Janácek, Berg, Busoni, Hindemith et du sérialisme viennois des années 20, dont il réussit à syncrétiser les tensions dans des discours saisissant d’inventivité et de pathos. Une belle découverte et des interprétations remarquables. (Jacques-Philippe Saint-Gerand)  Hans Winterberg, born in Prague in 1901, studied with Alexander Zemlinsky and Alois Hába. He worked as a conductor, pianist and composer until the annexation of the Czechoslovak Republic by Nazi Germany in 1939. As the scion of a Jewish family that had lived in Prague for centuries, he survived – after forced labor and deportation to Theresienstadt – through a series of miracles. Winterberg, whose compositional legacy has been rediscovered only recently, combines various influences in his music to create an original and exciting personal style. He takes up stylistic elements of Janácek but is also influenced by the Second Viennese School and French Impressionism. eda records dedicates a focus to this important CzechJewish composer, who saw himself as a bridge-builder between the cultures of Eastern and Western Europe.
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