 Qui peut le plus peut le plus. Après tant d’albums où ses fabuleuses facilités digitales finissaient par faire oublier l’artiste que sait être Marc-André Hamelin, le voici qui se confronte aux cahiers d’Images de Debussy et à son Second Livre de Préludes. Tempos larges, son capiteux et plein, dès Reflets dans l’eau, diffracté, étale, on sait qu’on a à faire à un grand Debussyste. Jamais anecdotique, jamais illustratif, Hamelin pense tout un orchestre au clavier dans la profondeur d’un toucher qui nous rappelle celui de Claudio Arrau. Qui l’eut cru du pianiste canadien, si versé dans les pyrotechnies? Le presque rien du Tombeau de Rameau, comme caressé de regrets, évoque la plainte lointaine d’un faune, alors que Mouvement fait écho à Feux d’artifices. Le programme est pensé d’après la couleur, mais la couleur intense, subtilement nuancée cependant tout au long d’un Deuxième Livre de Préludes où les atmosphères mortifères ajoutent une dimension fantomatique. Le caractère orchestral de La Puerta del Vino en étonnera plus d’un, avec ses accords rageurs, non plus un tableau gitan mais une nuit de monstres, un Goya. Fascinant, si inhabituel qu’on en redemande. L’humour persiffleur de "General Lavine" - excentrique contraste avec le tableau naïf de Bruyères, tout un univers avoue non plus son unité mais ses variations. Et quel toucher! Pas un marteau dans ce piano, mais des couleurs, des irisations, une utilisation intense de la pédale comme faisait d’ailleurs Debussy qui donne à tout une sensualité entêtante. Sommet de l’album, Ondine, une fantasmagorie. Bien des pianistes ont voulu depuis quelques temps un Debussy analytique, en sonorités froides, qui aurait écrit toujours dans le sens de la modernité. Hamelin le remet dans son époque, plus littéraire, plus inventif aussi, moins univoque. Feux d’artifice, hypnotique et narratif à la fois - on tient le tableau et la réalité dans un seul geste - pourrait en être le manifeste (Discophilia, Artalinna.com). (Jean-Charles Hoffelé)  Antoine Goléa disait que le piano de Debussy était son langage musical mis à nu. Ce piano n'est plus romantique, il n'est pas encore percussif mais il doit être polyphonique, réveur, poétique, riche en couleurs. Il est le sel, le bâti sans le sucre et le fard orchestral. Cette science alliant sophistication et simplicité fut illustrée par les grands pianistes debussystes : Claudio Arrau et Benedetti Michelangeli. A l'instar de la couverture du disque signée Seurat suggérant un personnage accoudé à un mur, ces Images (Livre I et II) et Préludes (II) pour le piano sont à la fois indistincts et clairement manifestes. Fugitifs, balayés par le souffle de l'impermanence, mais les teintes utilisées par Debussy sont si subtiles et les couleurs si lumineuses que l'on est en présence d'une évidence. Incontestablement virtuose, subjuguant ces pages comme un dompteur facile, Marc André Hamelin exploite sa (trop ?) grande maitrise du clavier au service de cette musique « impressionniste » (traduite par des impressions subjectives que suscitent les objets et la lumière et procède par petits touches). Il joue l'effet de miroir, d'écho, de reflet et de réverbération, multipliant les notes, les mains, les claviers, à la façon des peintres futuristes (Les tierces alternées, Poissons d'or). Alkan est passé dans ces doigts là. Mais il conjugue aussi ce mouvement oscillatoire à un statisme frôlant la tétanie parfois jusqu'au silence (Feuilles mortes, Ondine). Naturellement, il restitue l'aspect visuel des Images. Evocations de paysages de Monet, Pissarro, esquisses de Hokusai. Promenade à Giverny (Reflets dans l'eau, La terrasse des audiences au clair de lune), à Kyoto (...Et la lune descend sur le temple qui fut) et Séville (La Puerta del vino, noble et viril sans jouer l'espagnolade). Marc André Hamelin a la virtuosité calligraphique du geste et son jeu possède à la fois la légereté et la pudeur d'une plume (Les fées sont d'exquises danseuses, Canope) et la force de pénétration de l'encre sur le papier (Hommage à S.Pickwick). De splendides Feux d'artifice offrent une conclusion éclatante à ce disque très réussi. (Jérôme Angouillant)  Un nouvel album de Marc-André Hamelin se fête toujours. Dans son premier enregistrement consacré à la musique de Debussy pour Hyperion, il nous offre les deux livres d'Images, un chef-d'œuvre coloré, condensé enchanteur d'«odeurs, couleurs et sons». Il propose également une lecture poétique et évocatrice du second livre des Préludes. A new album from Marc-André Hamelin is always cause for celebration. Here in his first Debussy recording for Hyperion he presents the two books of Images: Debussy’s colouristic masterpiece, a bewitching compendium of ‘scents, colours and sounds’. Also recorded here is the second book of Préludes, in a poetic and evocative performance.
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