Urania Records a remastérisé trois concerts dont les bandes appartenaient aux archives soviétiques. Certes, le son est un peu délicat, les bruits parasites intempestifs. Mais, il s’agit, tout d’abord, d’un concert capté à Kiev (1959, 1960 ?) et au cours duquel Sviatoslav Richter interprète les quatre ballades de Chopin. En véritable narrateur. Le pianiste russe sait raconter, prendre des risques avec ses moyens techniques, prodigieux. Les interprétations sont « directes », sans l’ombre d’un doute. De ces doutes ou fragilités supposées que l’on entend chez Cortot ou Samson François. Chez Richter, c’est le lyrisme et la rectitude, deux qualités a priori antinomiques qui sont réunies. Le résultat est sidérant de grandeur. Il sait créer le silence puis déployer une énergie implacable. D’un bien meilleur confort d’écoute, les quatre scherzos captés à Munich en 1967 possèdent une légèreté électrisante. Sous les doigts du pianiste, la violence expressive peut même murmurée. Et quand la puissance est lâchée, pédale forte au minimum, c’est renversant. Hallucinant. Treize des vingt-quatre Etudes captées à Prague ont déjà fait l’objet de plusieurs parutions. En 1960 et dans des conditions sonores correctes, voici un Richter furieux qui « arrache » le son du piano. Il prend les auditeurs à la gorge, transfigurant sans artifice, simplement par l’impact des doigts, ces Etudes que l’on croit connaître par cœur. Elles jaillissent comme des personnages fantastiques. Et ce n’est pas seulement la technique qui laisse sans voix, mais aussi l’art du chant comme dans les études en mi majeur et ut dièse mineur, les plus lentes et poétiques des deux cycles. (Jean Dandrésy) Sviatoslav Richter’s discography is one of the most disorderly and complex discographies made by a pianist. Richter has recorded for several Russian, European and American labels, he has not dedicated particular monographs to any composer and he has authorized dozens of “live” at all times of his career. The result is a considerable confusion. The discography compiled by John Hunt (London, about 2000), under heading Chopin, includes 23 pages of recordings made over almost 40 years. Despite the amount of such recordings, we are still far from an organicity. Ballades, Scherzos, Studies, etc. are disorganized and they are often part of recordings made in different places, at diff erent times, with different sound techniques. Organizing an “organic” collection of studio recordings, was the task we set ourselves for this 2 CD box. In this way it is possible to access the teaching of this eclectic pianist, caught in his golden years, in the most complex repertoire of the Polish composer.
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