Joseph Bodin de Boismortier (1689-1755)
Sonate pour clavecin et flûte traversière, op. 91 (Dédiée à Michel Blavet)

Olga Martynova, clavecin (Von Nagel Workshop, Paris 1995, daprès N. & G. Blanchet, Paris 1730)
Ivan Bushuev, flûte (R. Tutz, Innsbruck, Autriche 2002, d'après G. A. Rottenburgh, Belgique 1760)

Confirmant le caractère heureux de l’initiative de Mondonville de redistribuer les rôles chambristes en propulsant le clavecin sur le devant de la scène dans ses sonates publiées en 1734, Rameau et Boismortier firent chacun paraître en 1741 un ouvrage dans lequel les instruments mélodiques, flûte, violon ou autre, devaient désormais composer avec le nouveau protagoniste, émancipé de sa fonction de basse continue. Cette démarche inaugura la musique de chambre « avec clavier obligé », située d’ailleurs sur un tout autre plan que les duos plus anciens de Bach dont le discours se fonde essentiellement sur le contrepoint. Les sonates de Boismortier en conservent toutefois le principe d’égalité les distinguant du courant qui allait dominer durant près d’un demi-siècle : les sonates pour clavier avec accompagnement ad libitum. Le mystère et la dimension intemporelle de la plupart de ses œuvres antérieures laissent place au charme et à l’hédonisme efficace mais raffiné du style galant, reflétant l’évolution du goût qui affecta tous les arts lorsque la solennité du Grand siècle se tut pour toujours au profit de l’esthétique du naturel et de la simplicité revendiquée par l’esprit des Lumières. (Pascal Edeline)