 Des nombreux compositeurs « franco-flamands » qui se fixent en Italie à la fin du XVème ou au début du XVIème siècle, Adrian Willaert (Bruges ? 1490 ? - Venise, 1562) est celui qui a eu l'influence la plus déterminante sur l'histoire de la musique dans ce pays. Des générations de compositeurs et de théoriciens se réclameront de lui. Il est un des inventeurs du madrigal renaissant italien. Quand en 1527 il est nommé maître de chapelle à Saint-Marc de Venise, il en fait pour plus d'un siècle le plus rayonnant foyer européen d'innovation musicale. Avec cette « Passion selon Jean », l'Ensemble « Dionysos Now ! » et son leader, le ténor – flamand – Tore Tom Denys poursuivent la redécouverte du pan religieux de son œuvre, le moins connu. Willaert y est moins novateur que dans le profane. Y coexistent deux tendances contraires : Une composition sur cantus firmus accompagnée d'archaïques constructions en canon ; et des procédés français, avec déclamation précise, sans mélisme ni imitation. L'invention musicale y est subordonnée aux sonorités et à l'agencement des mots. Willaert fait de la Passion, déjà dramatique et polyphonique depuis le XVème siècle, une suite de motets polyphoniques. Contrairement aux Passions baroques, il n'y a chez lui aucun souci de dramatiser, de mettre en scène le récit évangélique. Tout y est transcrit en polyphonie, y compris les dialogues des protagonistes. C'est que, dans le droit fil de l'esthétique de la Haute-Renaissance franco-flamande, pour Willaert, c'est de l’harmonie supra-terrestre de la polyphonie que doit naître l'émotion religieuse. Il est donc vain de chercher à situer son œuvre par rapport aux recommandations du Concile de Trente en matière de musique sacrée : Celles-ci ne seront émises qu'un an après sa mort. S'il devance ces recommandations, c'est dans le souci de l'intelligibilité du texte, et dans son austère beauté musicale. Ce qui nous vaut ce très bel album, important, nécessaire, et c'est l’essentiel. (Marc Galand)  Tore Tom Denys: "Adriaen Willaert’s little-known St John Passion is his only surviving setting of the Passion of Christ. With this recording, I want to prove that a compositional innovation took place in the Renaissance that aimed to make the recitation of the Passion on Good Friday (which was then traditionally sung in unison, Gregorian chant) more musically interesting. The passion is composed in an innovatively polyphonic, but homo-rhythmical manner: every voice sings the same text at the same time. This way, the text remains very intelligible, and the listener is captivated by the way the story is presented." All the “roles” that appear in his St John Passion are set in a polyphonic manner. The part of the Evangelist is worked out in four voices; Jesus in three voices; Pilatus, Ancilla, and Petrus in two voices; and the crowd (turba) in six voices. After the death of A. Willaert, this work has probably never been performed in its original form, as can be found in the part books (manuscripts, not printed). The “simple” lean and listener-understandable way in which these passions were composed, could be a consequence of the recommendations and restrictions imposed on the composers by their superiors, who at the Council of Trente (1545–1563) were looking for solutions to make the liturgy more attractive. In this, music played a major role.

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