Je me souviens encore du moment où je finissais d’entendre l’intégrale des Quatuors dédiés à Haydn de Mozart que les Klenke avaient fait paraitre chez Hänssler : ce jeu mobile, sans appui, cette lumière des timbres me rappelaient les anciens quatuors viennois, les Barylli et autres Kölisch. Pourtant Annegret Klenke et ses amies se sont rencontrées durant leurs études à Weimar, relativement loin de Vienne. Mais je n’y peux rien, la nature de leur sonorité d’ensemble m’évoquait une manière perdue de jouer en quatuor. Littéralement j’avais la sensation d’un voyage à rebours dans le temps, et voila que cet effet se reproduit à l’écoute de leur dernier album, cette fois consacré à un compositeur pour lequel elles semblent être nées : Franz Schubert. Attention, ne vous attendez pas à retrouver ici le jeu musclé et symphonique que les quatuors mettent à leur Schubert depuis les enregistrements du Quatuor Melos. Le geste des quatre dames est au contraire de cette manière. Sans le grand son des Alban Berg, leur discours fébrile est bien dans cette lignée surexpressive mais pourtant jamais soulignée. Une grâce quasiment mozartienne s’instille partout, et jusque dans les visions terrifiée du Quatettsatz qui ouvre leur disque. Le ton fantasque qu’elles mettent au si peu joué Quatuor D 46 laissait penser que leur version du Quatuor Rosamunde serait un nocturne enténébré. Et dès le premier thème de l’Allegro ma non troppo, murmuré, d’une désolation et d’une tendresse infinie, tout est dit. Lecture entre chien et loup, qui se refuse à toute aspérité, mais vous fera entre au plus profond de la lyre schubertienne. Les dames de Weimar nous doivent « La jeune-fille et la mort » (Discophilia - Artalinna.com). (Jean-Charles Hoffelé) Un art du quatuor explosif, c’est ce qu’offrent les quatre dames du Klenke-Quartett avec leur nouveau CD de la série Movimentos, paru chez GENUIN. Elles confirment ainsi les louanges dithyrambiques de la critique et les prix internationaux qui leur ont été décernés. Cette fois, elles brossent dans leur programme une fresque schubertienne, qui va du jeune compositeur Schubert jusqu’à la maturité de son quatuor Rosamunde. C’est justement dans ce vis-à-vis que se révèle de manière si particulière la force de cette musique. Le jeu de l’ensemble est nerveux, sans se faire pressant, d’une grande beauté de timbre et néanmoins léger, clair sans être déstructuré. Un moment d’une intensité et d’une richesse qui raviront tout amateur de musique de chambre ! The four women of the Klenke Quartet offer explosive quartet art in their new GENUIN CD from the Movimentos Edition. With it, they confirm the sheer exuberant critical acclaim and international prizes that they have received lately. They span a broad arch here, and not only through the program, which ranges from early Schubert up to his mature Rosamunde Quartet; in this particular lineup the power of this music unfolds in a special way. The ensemble’s performance is energetic without being brash, beautiful sounding without being heavy, and clear without being analytic. An intense and extremely rewarding experience for chamber music lovers!
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