 Schubert et Chostakovitch. Deux univers a priori inconciliables. Pour autant, l’alto évoque à merveille les solitudes et douleurs des deux compositeurs. Dans l’Europe centrale et dans l’univers slave, sa place est éminente au sein même du répertoire de la musique de chambre. Rappelons que l’étrange arpeggione, instrument imaginé entre la guitare et la viole de gambe à six cordes inventé par le luthier Stauffer en 1823 n’eut qu’une vie bien brève. Schubert répondit à la commande destinée à promouvoir cet arpeggione et nous livra un chef-d’œuvre. Les transcriptions sont multiples : violoncelle, contrebasse, guitare, clarinette, flûte et alto. Les timbres, les couleurs de chaque instrument varient la nature de la composition. En effet, grâce à l’alto, la page est à la fois plus intimiste et plus douloureuse. Sous l’archet d’Andreas Willwohl, l’esprit du lied et le chant populaire dominent dans les trois mouvements. L’accompagnement délicat de Daniel Heide est parfait. On regrette que la réverbération soit à ce point accentuée dans l’acoustique de la Paterskirche de Kempen, en Allemagne. Un siècle et demi après la Sonate de Schubert, Chostakovitch achève sur son lit de mort, son ultime partition. Il n’eut pas l’occasion d’entendre son ultime partition. Il s’agit non seulement d’une œuvre testamentaire, mais également d’une tentative de réconciliation entre modernité et tradition. L’instrument si proche de la voix humaine, à l’écriture intense et dépouillée rend de multiples hommages. L’alto danse sur le rythme intangible du piano. Le finale possède la pureté d’un adieu bouleversant au monde et la Sonate “Au clair de lune” de Beethoven est le fil conducteur de ce chant du cygne. Parfaitement en place, la version qui nous est proposée est presque “trop” belle, loin du cri de révolte et de désespoir proposé par les interprètes slaves. On admire la grandeur imposante de la lecture, peut-être davantage que le message terrible que contient cette page. (Jean Dandrésy)  One of Schubert's legacies with one of his most beautiful compositions is the Arpeggione Sonata. Schubert took a liking to the bowed guitar, at least for one veritable work: the Sonata in A minor, composed in November 1824. ..... The Arpeggione instrument disappeared as quickly as it had arrived. All these attempts around 1800 to expand the family of string instruments had long been forgotten when Franz Schubert's Arpeggione Sonata was published for the first time 43 years after his death in 1871, immediately with alternative solo parts for violin, viola or violoncello. Almost all violists and cellists have included Schubert's marvellous Arpeggione Sonata in their repertoire - thus keeping alive the memory of the attempt to make the proverbial 'pearl sounds' accessible for string instruments - for an eternity.Shostakovich's viola sonata conveys a special, gradually dissolving sense of time. It is neither at home today, nor yesterday, nor in the future, but in eternity. The composer himself said almost nothing about the work, except that it was "bright and clear". He called the first two movements a "novella" and a "scherzo". About the finale, he revealed that it was "an adagio in memory of Beethoven". The Viola Sonata is Shostakovich's last work and, beyond personal consternation, it is an exploration of the last things, as many important composers have done; important references for Shostakovich were, for example, Beethoven's Sonata op. 111 or Mahler's Symphony No. 9 and Das Lied von der Erde.

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