Carl Orff (1895-1982)
Gisei op. 20, drame musical d'après la tragédie japonaise "Terakoya", traduction en allemand de Karl Florenz

Ryan McKinny
Ulrike Helzel
Markus Brück
Elena Zhidkova
Kathryn Lewek
Jana Kurucova
Burkhard Ulrich
Chœur et Orchestre de l'opéra de Berlin
Jacques Lacombe, direction

L'opéra Gisei est brièvement mentionné dans l'ouvrage pourtant exhaustif de Piotr Kaminski (Mille et un opéras) comme un «...opéra de jeunesse influencé par le Pélléas de Debussy ». C'est en fait une vraie découverte, inédite au disque. Fruit de la passion du compositeur pour la culture asiatique, Gisei Das Opfer (Le sacrifice) est composé en 1913 par un jeune homme de dix-huit ans. Le livret est fondé sur deux formes de théâtre japonais : Nô et Kabuki, tout en référant implicitement à la tragédie grecque. L'histoire est empreinte d'un symbolisme sombre et onirique issu de l'univers de Maeterlinck mais exploite aussi un réalisme assez cru. L'exotisme du texte génère une musique parfumée à l'ambre et au musc, (fragrances que l'on retrouvera chez Orff dans des œuvres plus tardives avec l'utilisation d'instruments japonais) et d'emprunts à ses contemporains : Debussy, Puccini, Richard Strauss, mixture atypique du style futur du compositeur. Longues plages orchestrales hiératiques flanquées d'un chœur lugubre (Le prélude) brisées dans la seconde partie (L'opéra en lui-même) par les interventions scandées des voix qui déroulent le drame dans une partition tour à tour élégiaque et dense, sans aucun temps mort. L'interprétation du Deutchen Oper Berlin dirigée par Jacques Lacombe rend bien justice à l'œuvre, servie par des chanteurs dans des rôles dont la vocalité comporte des difficultés : mention au Tonami de la mezzo Ulrike Helzel et au Genzo de Ryan McKinny, fort bons acteurs au demeurant. Signalons la parution simultanée d'une belle version scénique en DVD chez Wergo superbement mise en scène par John Dew. (Jérôme Angouillant)

In 1913, when he was only eighteen years old, Carl Orff finished his first opera – Gisei. This tragic story featuring the sacrificial death of a child as well as Japanese culture in general so greatly inspired the young composer that throughout his life he remained fond of Japan. In Japanese tragedy he found numerous similarities to the ancient Greek tragedies of Sophocles, with which he constantly engaged himself intensively. A carefully groping version of the young Carl Orff with suggestions of the avant-garde can be heard in the ancient Japanese drama focusing on a village school at which a high-ranking official sacrifices his own son in order to save his master’s son. Even though many stylistic features seem to have been derived from various sources, certain tonal gestures and over long stretches the instrumentation anticipate the imagination of one of the most original composers of the twentieth century. Orff perhaps later met Felix von Weingartner at the Darmstadt Court Theater and possibly also told him about this subject matter there. At any rate, Weingartner’s later one-act Die Dorfschule is also based on the Terakoya material. Next month we will release this version, again in a recording with the German Opera of Berlin.