 Ce n’est pas un secret, chez George Szell ce que le disque asséchait en perfection, le concert le délivrait en énergie pure, que ce soit avec le Concertgebouw, les Wiener Philharmoniker, ou plus encore avec la Philharmonie Tchèque. Il n’en allait pas différemment avec les Berliner Philharmoniker, et peut-être même plus encore. Herbert von Karajan ne craignait pas de lui confier son pur-sang, la battue impeccable du chef tchèque, son sens aiguisé de la balance, ne risquait pas de le blesser. Les concerts de 1957, opportunément édité dans cette jolie petite boite, valent par une Eroïca incendiaire, où Szell prends justement le contre-pied de la « méthode » Karajan : il fait la chasse au legato, demande aux pupitres d’attaquer, dégraisse le quatuor de ses contrebasses qui doivent rentrer dans l’équilibre sonore clair qu’il imagine, fouette les rythmes. Tout cela aurait pu risquer l’univoque, mais au contraire cette proposition est emplie de coups de théâtre et semble ne plus se soucier des canons de limpidité, et même de l’exactitude qui font la signature Szell. Fascinant. Plus attendu, le concert Mozart n’atteint pas aux mêmes libertés, mais le Concerto KV 503 où il retrouve son cher Leon Fleisher est éblouissant de verve et de caractère, bien plus que les deux Symphonies, parfaites et lisses. Merveille absolue, La Mer donnée six jours plus tard, Jeux de Vagues surtout, où Pan semble paraître, lecture hypnotique en teintes fauves, une méditerranée immémoriale effaçant les embruns océaniques. Après de telles images, le Concerto de Mendelssohn, aussi parfait sous l’archet de Nathan Milstein que dans l’orchestre sur les pointes que lui offre Szell donne illico envie de retourner à ce Debussy que Charles Munch n’eut pas désavoué. (Discophilia - Artalinna.com) (Jean-Charles Hoffelé)

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