Les quatre œuvres regroupées sur ce disque illustrent la fidélité de Jean Françaix (1912-1997) à son idéal (« S’il y a seulement les imbéciles qui ne changent pas, alors je dois être imbécile, parce que je ne change pas »). Seuls les Cinq portraits de jeunes filles (1936), dédiés à Isidor Philipp, son professeur de piano au Conservatoire de Paris, datent d’avant la Seconde Guerre mondiale, soit avant la relative disgrâce dont fut victime sa musique d’esprit néo-classique dans l’étouffoir sériel. Entre la Rhapsodie pour alto (1946), transcrite dans une version avec piano, et le Trio pour clarinette, alto et piano (1997), l’esthétique, empreinte de délicatesse, de fraîcheur et de clarté, ne varie guère au même titre que le but avoué de leur auteur : « faire plaisir ».

Le Trio di colore, dont les membres se sont rencontrés à la Jacob School of Music de l’Université d’Indiana, saisit à merveille l’esprit de ces pages présentées sur ce bref programme dans l’ordre inverse de celui de la composition. Le clarinettiste Guy Yehuda, l’altiste Yuval Gotlibovich et le pianiste Jimmy Brière ne jouent en fin de compte ensemble que dans le Trio, enjoué, en particulier dans le Presto final, et filant droit. Le plaisir se prolonge avec des Tema con variazioni pour clarinette et piano (1974) et une Rhapsodie exécutés avec nuances, finesse et un joyeux sens de la répartie. Les titres que Françaix a conférés à chacun des Cinq portraits de jeunes filles dénotent l’hommage à Couperin (« La Capricieuse », « La Tendre », « La Prétentieuse », « La Pensive » et « La Moderne »). L’interprète respecte leur concision et leur humour pince-sans-rire.