Cinq compositeurs de l’école de Leipzig en pleine période romantique, dans cinq craquantes fantaisies pour alto et piano. Deux interprètes de l’école russe, débordants d’énergie et de lyrisme, dans un beau disque de musique de chambre, élégant et raffiné, qui saura plonger l’auditeur au cœur des fantastiques soirées viennoises.  Caro Mitis, fruit mûr, doux, à la chair tendre, et voici que ce label ressort des archives moscovites un enregistrement de 2006, à la prise de son impeccable, habilement digitalisée à partir d’une matrice analogique, qui propose une série de pièces de fantaisie mettant en valeur la chaleur boisée d’un magnifique alto apparié à un piano sensible et tout de nuances. Des qualités essentielles mises au service d’un programme qui, sans elles, pourrait sembler un peu monochrome. En effet tous les compositeurs illustrés par nos artistes se meuvent dans l’univers romantique tel qu’on a l’habitude stéréotypée de le concevoir : effusif, mystérieux, passionné, usant d’un langage d’époque commun qui peut faire craindre la dissolution de leurs spécificités stylistiques. Or, grâce à la complétude d’Ilya Hoffman, altiste, et de Sergey Koudriakov, pianiste, chacun de ces compositeurs trouve et fait distinctement entendre sa voix. Hans Sitt (1850-1922), récemment illustré par Alicia Calabuig (Clic Mag 121), ainsi que Ernst Naumann (1832-1910) voient leurs trois Fantaisies, respectivement op. 58 et op. 5, très subtilement différenciées : nimbées de nostalgie chez Sitt, beaucoup plus animées et impulsives chez Naumann. On notera que ce sont d’ailleurs là des enregistrements en première mondiale. Carl Reinecke (1824-1910), injustement négligé, affirme dans son op. 43 sa nature d’humeur expansive notamment dans son n° 3 : Jahrmarkt-Szene. Niels Wilhelm Gade (1817-1890) propose quatre pièces dans son op. 43, qui peuvent faire penser à un programme de sonate déguisée, le troisième mouvement étant d’inspiration folklorique. Enfin les trois pièces de l’op. 73 de Schumann, initialement composées pour clarinette, violon ou violoncelle, sont jouées avec fougue à l’alto dans la version pour violoncelle. Un enregistrement remarquable qui saura ravir les amateurs de l’alto et les amoureux de la musique « romantique ». (Jacques-Philippe Saint-Gerand)

|