 Votre serviteur, qui goûte rarement Saint-Saëns (et privilégie sa musique de chambre), est un drôle d'animal : tel ici ces ''personnages à longues oreilles'', il est possiblement cet âne qui aurait mis un bonnet d'homme. Car ce Carnaval, il l'a toujours préféré justement chambriste, essentiellement avec quintette à cordes et deux pianos. Mais cette nouvelle orchestration est délicieuse, aérée, transparente ainsi qu'aux plus beaux jours du marigot de notre mare au canard humoristique. C'est le talent – ravélien, voire tchaikovskien, un petit côté russe... - de ce drôle de compositeur anglais (comment peut-on être anglais ?). Par surcroît, l'orchestre de la BBC et ce chef sont au top de la précision et de la clarté, de même que la prise de son (qui n'est pas toujours le fort de ce label, dans l'instrumental comme en chambre). On se régale, on rit beaucoup, sans danser la javanaise mais n'en déplaise à un compositeur qui ne gardait jamais longtemps son esprit de pas sérieux, et interdit rapidement cette remarquable pochade (en dehors du cygne, régal des violoncellistes). Parce qu'elle fut dirigée authentiquement de son vivant par un certain... Lebouc ? Seule petite réticence ici : un coucou clarinette qu'on n'entend pas très clair et net au fond des bois...Et donc, du compositeur-arrangeur-chef d'orchestre Richard Blackford, on nous donne aussi une composition orchestrale d'une demi-heure, commande festivalière créée en juillet 2014. C'est écrit en collaboration avec un preneur de son spécialisé dans le monde sauvage animal, d'où une sorte de biosymphonie très colorée en cinq mouvements, passant du gros mammifère exotique à l'insecte ou à l'oiseau. Là encore, un délice récréatif autant que roboratif. Un petit côté livre de la jungle (prononcer jongle, je vous prie), mon cher Kœchlin. Et à qui préjugerait qu'il n'aimera pas cela, nous répondons d'avance : qu'est-ce qu'on barrit ? (Gilles-Daniel Percet)

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