Georges Bizet (1838-1875)
Djamileh, opéra en 1 acte

Jennifer Feinstein, mezzo-soprano (Djamileh)
Eric Barry, ténor (Haroun)
George Mosley, baryton (Splendiano)
Piotr Kaminski, récitant (Le marchand d'escalves)
Chœur de Chambre de Poznan
Bartosz Michalowski, direction
Orchestre Philharmonique de Poznan
Lukasz Borowicz, direction

Sixième œuvre lyrique de Bizet et avant-dernier opéra avant Carmen, Djamileh ne s’imposa jamais vraiment dans le répertoire. La faute à un livret privant les trois personnages de véritable personnalité et de trame dramatique. La faute aussi à une création catastrophique, mal distribuée, mal chantée qui condamna l’opéra au bout de seulement onze représentations. Ce n’est malheureusement pas cet enregistrement capté lors du Festival Beethoven 2017 qui réconciliera le public avec cet opéra méritant pourtant qu’on s’y arrête. Aucun des trois chanteurs ne parvient à maîtriser correctement la prononciation de cette langue qui ne leur est pas maternelle. Du coup, les dialogues parlés sont incompréhensibles tandis que le livret paraît chanté en une langue imaginaire faisant vaguement penser à du Français. On regrettera surtout la voix agressive de la mezzo-soprano Jennifer Feinstein qui confond dans son duo final joie et cri et le timbre acide du ténor Eric Barry. Un orchestre moyen, bien dirigé par Borowicz en habitué des lieux, et une prise de son manquant de tout naturel finissent de rendre l’écoute désagréable. La version Popp/Bonisolli/Lafont/Gardelli reste la référence incontestable. (Thierry Jacques Collet)

Quoi de plus louable que de vouloir tirer d’un oubli relatif ce court opéra-comique de Bizet, inspiré d’un conte de Musset, par la parution d’un luxueux coffret cd, sans notes en français cependant, mais incluant le libretto complet ? Pourtant, si l’Orchestre Philharmonique de Poznan emmené par Lukas Borowicz s’efforce de rendre la couleur et la légèreté de la partition orchestrale, que l’Arlésienne et Carmen allaient confirmer, la diction et le chant de Jennifer Feinstein, dans le rôle-titre, alourdissent malheureusement l’interprétation, conférant trop peu de crédibilité au personnage. Dommage car le Splendiano de George Mosley est plutôt convaincant tandis que le chant d’Eric Barry, dans le rôle d’Haroun, quand il n’est pas trop nasal, est convenable. Faut-il donc voir là un mauvais sort s’acharnant sur l’œuvre, comme, en 1872, avec Aline Prelly, créatrice du rôle ? Ou bien cela tient-il, aussi dès le départ, au défi d’avoir conçu ce rôle pour une mezzo-soprano, difficulté contournée par Lucia Popp ? A quand une interprétation qui, à défaut de l’humour que recèle le poème de Musset, rendra la fraicheur de cet opus au lieu de le tirer vers la caricature orientaliste de style pompier ? (Alain Monnier)

The one-act opera by Georges Bizet to the libretto by Louis Gallet tells an oriental love story between the title slave Djamileh and Cairo sultan Haroun. The plot, bringing to mind the atmosphere of One Thousand and One Nights, is a quite typical example of Romantic fascinations with the East. From the very beginning it raised Bizet’s doubts, who considered it to be too difficult for a stage adaptation. However, the artistic craft of the creator of Carmen balanced the libretto’s deficiencies, surrounding the story of oriental lovers with a suggestive sound aura, achieved thanks to an original instrumentation and bold, chromatised harmonic language. The craftsmanship of Jenniefer Feinstein, performing the title part, allows the listener to enjoy all values of this little known opera.