Deuxième parution d’Enrico Belli sur le label Wergo, cette fois-ci aux côtés de sa compagne, Olivia Belli, dans un enregistrements alternants les deux parties du Sacre du Printemps de Stravinski, au Makrokosmos IV de Crumb, dans leurs versions pour duos de pianos.  En quelques mois, le label allemand Wergo publie deux enregistrements extrêmement différents du Sacre du printemps dans son arrangement pianistique, réalisé par le compositeur lui-même. Au Buffalo-Williams duo, qui en exaltait tout l’imperturbable flux rythmique et l’enivrante sauvagerie sonore, le duo formé d’Enrico et Olivia Belli oppose une conception qui met en valeur avant tout la richesse harmonique, l’incroyable audace des motifs et des agrégats sonores. Précision du dessin extrême, comme en témoignent le début – formidable - des Rondes printanières, ou le passage en notes pointés - originellement des pizzicatos de premiers violons - à la fin de l’introduction (Première Partie), juste avant les accords répétés des Augures printaniers. Il y a ici chez les Belli quantité de couleurs, d’expressivité, d’intelligence, et de férocité aussi. Leur interprétation, méticuleusement réfléchie, moins spontanée que chez les Buffalo-Williams, atteint son apogée poétique dans l’Introduction de la deuxième partie, mystérieuse à souhait, pleine d’anxiété, puis dans une extraordinaire Danse Sacrale finale, véritable exutoire de la tension accumulée, d’une précision rythmique étonnante. Une vision à connaitre absolument, d’autant que le Livre IV du Makrokosmos de Crumb, musique interstellaire et ô combien désarmante également, trouvent des interprètes encore une fois superbement inspirés, lumineux, sensuels, d’une humilité désarmante. Enrico Belli reproduit une réussite comparable à son album composé du Premier Livre des Préludes de Debussy mis en parallèle avec le celui du Makrokosmos de Crumb. (Pierre-Yves Lascar)

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