 J'avais, en 2015, attiré l'attention sur un CD d'œuvres de Blas de Castro, compositeur espagnol, interprétées par ces mêmes musiciens, adeptes d'une pratique minoritaire dans l'art de la Renaissance — le cantar alla viola. Lequel consiste en la réduction à une voix et une viole, d'œuvres polyphoniques écrites pour une ou plusieurs voix avec accompagnement de plusieurs instruments ou d'un instrument à plusieurs voix. Si aucun manuscrit d'œuvre, aucune partition n'illustrent concrètement l'existence de cette pratique, elle est en revanche attestée, commentée et recommandée par de nombreux traités musicaux, comme ceux de Ganassi. L'art se fait là à la fois austère et d'une exigence folle dans son minimalisme : il doit rendre à deux ce qui, normalement » est le résultat d'une combinaison de timbres bien plus riche. En pariant sur les subtilités expressives de la voix humaine, et de son meilleur allié, la viole, réputée être l'instrument le plus proche et donc le plus autre à la fois, de cette voix. Gageure qui, dans ce CD est encore plus bluffante que dans le précédent, le répertoire italien étant bien plus varié dans ses procédés, raffiné dans sa trame que la musique espagnole d'un de Castro. Le résultat est admirable : voix étincelante de N. Balbeisi, jeu prodigieux d'ingéniosité du violiste, qui utilise d'ailleurs différentes violes — vilhuelas espagnoles y comprises — selon les pièces. On percevra peut-être toujours un manque dans cette réalisation, dans la mesure même où l'on sera toujours tenté d'y fantasmer les autres voix — présentes dans d'autres versions. Mais si c'était là précisément sa force, que de toujours suggérer l'absence dans la présence, la plénitude et la splendeur dépouillée de ce qu'elle donne à souverainement à savourer ? (Bertrand Abraham)  This CD is dedicated to one of the most esteemed musical practices of the Renaissance: the art of accompanying the voice with the viola da gamba. Cantare alla viola (singing with a viol) is the name for this practice which was quite common at the time. The art of this practice lies in the ability of the 'viola' player to arrange and play madrigals to accompany one single voice, as a lutenist or vihuela player commonly does. Cantar alla Viola has careful selected some of the finest pieces of the Italian Renaissance in order to illustrate the intimate and skillful musical practice of Cantare alla viola. The pieces vary from the subtle and transparent trecento 2-voice ballades of Magister Piero and Andrea da Firenze played on the viella, to the exquisite and virtuous madrigals for one soprano by Luzzascho Luzasschi, accompanied by the viola da gamba. The Renaissance villanelle and 3-voice madrigals by Luca Marenzio and Costanzo Festa, are adapted for the polyphonic playing of two different bowed vihuelas. Solo pieces have been added to the disc to show the instrumental practice on a bowed vihuela through arrangements of lute and keyboard pieces by composers such as Marco Antonio Cavazzoni or Francesco da Milano.

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