Jean-Philippe Rameau (1683-1764)
Hippolyte et Aricie, tragédie lyrique en 1 prologue et 5 actes

Ed Lyon
Christiane Karg
Sarah Connolly
Stéphane Degout
Orchestra of the Age of Enlightenment
The Glyndebourne Chorus
William Christie, direction
Jonathan Kent, mise en scène

D’emblée : le chef d’œuvre de Rameau, outrageusement relu par Jonathan Kent, spectacle flashy et qui s’imagine provocateur, ne se regarde simplement pas, d’autant qu’Ivan A. Alexandre avait préalablement remis Hippolyte et Aricie dans les lumières, les costumes, les décors et la machinerie de son temps tout en relisant sa dramaturgie avec finesse : le spectacle capté à Garnier est paru chez Erato. Ici il vous faudra donc entendre ce DVD, paradoxe courant pour des captations qui donnent à voir des outrages mais conservent pour l’oreille la part essentielle du travail des artistes engagés dans ces galères : la musique. Menée grand train par William Christie, la première Tragédie Lyrique qui coula de la plume de Rameau l’année de ses cinquante ans s’anime avec un art dramatique pas entendu depuis Marc Minkowski. La puissance des enfers saisit, la profondeur de l’orchestre, le geste tendu font une grande soirée d’opéra dès que l’on ferme les yeux. Phèdre (Sarah Connolly) et Thésée (Stéphane Degout) renouvellent leurs incarnations si éloquentes trouvées à Garnier dans la mise en scène d’Ivan A. Alexandre, Ed Lyon et Christiane Karg font un couple bien chantant et soignant autant qu’ils le peuvent leur français, mention spéciale à l’Arcas d’Aimery Lefèvre et au trio de Dieux selon François Lis. Décidément un Hippolyte et Aricie à entendre (Discophilia, Artalinna.com). (Jean-Charles Hoffelé)

Pour commencer, une bonne surprise : Jonathan Kent livre une mise en scène inventive, qui fourmille d’idées et d’audaces esthétiques, qui font toutes sens, sans oublier l’humour inhérent à l’œuvre : Rameau prenait ses personnages beaucoup moins au sérieux que Racine. Cette production, sans être objectivement belle, se regarde donc avec plaisir. D’une distribution solide (et qui a travaillé sa diction française) se détachent deux individualités, deux fauves déchaînés : la Phèdre de Sarah Connolly, sculpturale dans sa robe rouge sang, tragédienne accomplie, est une torche vive. Le Thésée viril de Stéphane Degout, voix de bronze, est d’une tenue royale. William Christie délaisse ses Arts Florissants pour l’Orchestre de l’enlightment, leur entente est évidente, et la tension ne se relâche jamais. Au plus intime du drame, les musiciens épousent les sentiments des personnages. La pulsation et la précision maniaque du rythme nous valent des scènes de ballet d’un naturel irrésistible. Avec cette production, Rameau fait une entrée brillante au répertoire de Glyndebourne, le public enthousiaste, ne s’y trompe pas. (Olivier Gutierrez)