 Gottfried van Swieten (1733-1803), d’ascendance néerlandaise, Baron de l’aristocratie habsbourgeoise, mélomane compositeur amateur de trois opéras et quelques symphonies, tenant salon, est aujourd'hui connu pour son amitié avec Haydn et Beethoven ainsi qu’avec Mozart, à qui il fit connaître J. S. Bach et Hændel. En 1782, Mozart écrivait à son père qu’il collectionnait chez le baron les fugues d’Emanuel (1714-1788) et Wilhelm Friedemann (1710-1784) Bach, ainsi que celles de Johann Sebastian… À la recherche d’une restitution des pratiques instrumentales contemporaines de Mozart, Keiko Schichijo, pianiste et pianofortiste japonaise installée aux Pays-Bas, entend fonder ses interprétations non seulement sur les traités de l'époque (CPE Bach, Leopold Mozart) mais aussi sur les rouleaux de piano fabriqués par Carl Reinecke (1824-1910), réputé avoir été "parfaitement au courant des meilleures traditions du jeu mozartien". Elle fait donc siens les procédés expressifs non notés d’ornementation, d’arpègement des accords, de désynchronisation des mains ainsi qu’une approche très libre du rythme et du tempo, comme en témoigne le présent enregistrement. Ces procédés transgressifs sont extrêmement surprenants au regard des normes modernes — on songe ici à Wilhelm Backhaus et à l’esthétique de la Neue Sachlichkeit — et peuvent ne pas convenir à tout le monde, mais on reconnaîtra que les libertés prises par Keiko Schichijo s’intègrent organiquement avec goût à la texture musicale de ces cinq œuvres. Une lecture intensément personnelle donc, mais non sans intérêt, qui, associée aux sons étonnamment puissants qu'elle tire du fortepiano Stein de 1802, capté de très près, propose une séduisante vision alternative de ces pièces bien connues. Les sonates et la fantaisie de Mozart y gagnent une saisissante allure Sturm und Drang, tandis que le modeste Clavierstück de Carl Philipp Emmanuel Bach sonne, pour finir, comme un moderne écho inattendu du premier Prélude du Clavier bien tempéré de son père. À déguster inconditionnellement. (Jacques-Philippe Saint-Gerand)  In 1782, Mozart regularly attended a salon sponsored by the Dutch diplomat van Swieten, where he was introduced to the music of Bach and Handel. This experience led to a change in the composer’s own creativity and compositional style, opening his mind to new harmonic structures, contrapuntal techniques and dramatic expression. This album offers a glimpse of the transformation of Mozart's wonderful “musical consciousness”. I aim to convey the striking expressivity of the 19th century performance of Mozart’s music,while benefiting from the musical creativities from today. (Keito Shichijo)
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