 La formation du compositeur anglais Kenneth Leighton (1929-1988) est typique du cursus musical anglo-saxon: choriste à Wakefield, sa ville natale, pianiste puis diplômé de musique au Queen's College d'Oxford, il part en Italie suivre l'enseignement de Petrassi, puis enseignera dans diverses universités (Leeds, Oxford), jusqu'à sa mort à Édimbourg. Au même titre que Elgar, Vaughan Williams,Walton ou Finzi, il fait partie de cette école anglaise d'après-guerre empreinte d'un sentiment à la fois nationaliste et romantique. Issu de cette mouvance, son langage musical se colore toutefois de sérialisme (L'influence de Petrassi). Saluons en passant Resonus, nouveau label londonien qui publie ce coffret de l'œuvre complète pour orgue du compositeur. Présentation soignée, notice anecdotique mais instructive. Baignant dans la musique d'orgue depuis l'enfance et fin connaisseur de l'instrument, Leighton n'en demeure pas moins pianiste. Il compose avec l'orgue, ajoutant ça et là : un autre orgue, une voix, un violon. Il pratique aussi bien le clavier que le pédalier et lorsqu'il improvise, il remplace curieusement l'orgue par un clavecin (Improvisations on De profundis). A part quelques œuvres profanes particulièrement évocatrices composées dans les années 60 (Elegy, Festival Fanfare, Ode, Paean), son corpus d'orgue est dédié à la liturgie. Leighton use d'une palette modale et diatonique, de fonds et de textures que l'on trouve chez les organistes français, Vierne, Dupré et à un autre niveau chez Messiaen. La Messe en est l'illustration ainsi que le Veni Redemptor et le Veni Creator qui sont des variations statiques autour d'un motif de choral. Les autres pièces font appel au contrepoint (le Et Resurrexit, le Prélude Scherzo & Passacaglia (1966-63) comportant des fugues), et à la polyphonie, (La très sombre « Fantasy on Es ist Genug » avec le violon inspiré de Chloé Hanslip). Les « dialogues » pour deux orgues intitulés « Martyrs », alternent climats fondus et déclamatoires, évoquant l'univers suspendu et intériorisé de Jehan Alain. Quant à la pièce pour ténor, « A song of renewal » (1981) elle dépare par une surenchère expressive, portée par le timbre puissant du ténor Nicky Spence. Les petites pièces improvisées datées de 1977 et jouées au clavecin par Stephen Farr rappellent in fine l'influence du clavier de Paul Hindemith sur le compositeur anglais. (Jérôme Angouillant)

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