 Dudamel, c'est notre énergique ami Monsieur Dynamo. Nous le découvrîmes soulevant de scène son orchestre lumineusement exalté de mioches vénézuéliens des quartiers pauvres. Avec lui, l'homme n'est plus un animal dont les pieds vont jusque par terre. Un côté Zébulon généreux mais attentif qui n'est pas sans rappeler Bernstein. L'amphi du Hollywood Bowl (18 000 places), sur les hauteurs étoilées de Los Angeles, vibre de toute sa conque à l'apparition du fameux philharmonique. La nuit tombe, le tout public sympathique s'ébroue, ça tangotte déjà du côté de Bételgeuse. On est parti pour une heure et quart de nuit argentine, nuit caline, nuit mutine. Le tangazo un peu sombre nous montre un Piazzola plus profond que de coutume (les cordes, avant le premier appel dansant de flûte). Dans le gracieux concerto de Schifrin (il est là pour nous saluer!), la splendide chemise colorée du guitariste dit tout de l'esprit de cette musique. A la fin, le bandonéon propulse de vrais danseurs (une bande au néon !). Mais auparavant, le frénétique, grondant, acide, polyrythmique, et puis soudain bucolique, tendre et lyrique Ginastera nous offre bien la grande surprise du chef. Lequel on ne souhaiterait plus que dans cet insu chef d'oeuvre du même qu'est le tellurique Popol Vuh, ou la déraison tonnant son cratère, dont bizarrement on ne connaît guère encore que deux ou trois enregistrements. En attendant, concert ici d'un charme absolu, très agréablement capté par un réalisateur en connaissant un rayon bleu, avec (outre l'excellence de la définition, de la couleur et du son) ses variations de gros plans et légers travellings : tiens, ce violoniste, c'est Raymond Devos ! Ah, tu trouves ? contredit la femme éternelle. (Gilles-Daniel Percet)

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