 Spécialisé dans la musique des XXe et XXIe siècles, le trio Gœyvaerts (du nom du compositeur belge Karel Gœyvaerts) met ici à l’honneur dans un double disque quatre compositeurs soviétiques. C’est le trio à cordes en trois mouvements de la russe Sofia Gubaidulina qui débute ce nouvel album. Composé à la mémoire du poète Boris Pasternak, son écriture horizontale permet aux trois instruments de succéder les uns aux autres. L’individualité ainsi rendue au trio, dans une forme de trois-en-un pouvant faire référence à la Trinité, ne surprend pas de la part de l’ancienne assistante de Chostakovitch dont on connaît l'intérêt pour le symbolisme chrétien. Deux pièces du géorgien Guia Kantcheli, dont “Time... and again” écrit à l’origine pour Gidon Kremer et retranscrit ici pour trio, complètent le premier disque avec une pièce du moscovite Oleg Paiberdin. Le deuxième volet, consacré à la poésie, offre la lecture de six poèmes de Fyodor Tyutchev par le compositeur Alexander Knaifel. Une pièce pour trio du même Knaifel clôture enfin ce convaincant voyage à l'Est. (Benjamin Esterni) "Voir le monde dans un grain de sable" dit la citation du Poète britannique William Blake. "Grain de son" pourrait-on presque dire tant chacune de ces œuvres commence avec bien peu, une note ou deux tout au plus. Un autre dénominateur commun est la nationalité de leur compositeur, tous issus de l’ex-bloc soviétique : La Russie pour Knaifel, Paiberdin et une Gubaidulina à l’héritage tatar, la Géorgie pour Kancheli. Sans parler de minimalisme, leur attitude très économe dans l’utilisation des sons, découle d’un état d’esprit extrême et souvent fragile forcément lié à leur passé. On peut plutôt y voir une forme de maximalisme, qui exprimé à travers des moyens limités donnent l'illusion d'être minime - le monde dans un grain de sable, encore. De sessions de travail en répétitions intenses avec des compositeurs investis personnellement, le Trio Goeyvaerts obtient un résultat proche de la perfection. All the music on this recording has at least one thing in common: it seeks to find the oak tree in the acorn, or William Blake's “world in a grain of sand”. One might almost write “grain of sound”, because all these works begin with very little — a note or two, something not far removed from silence, a seed that gives rise to an entire, and frequently paradoxical, world of consonance and dissonance, monologue and dialogue (and, here, trialogue), growth and retrenchment, height and depth. Another common element between these works is that they were all written by musicians from different parts of what used to be the Soviet Union: Knaifel and Paiberdin are Russian, Gubaidulina also, though of Tatar heritage, and Kancheli is Georgian. Their highly economical attitude towards sound — we are not talking here about minimalism, but rather a kind of maximalism, expressed through limited musical means that can initially give the illusion of being minimal (a world in a grain of sand) — corresponds to the extreme, often fragile, states of spirit with which they deal, and which could only have been arrived at by musicians with such a background. The Goeyvaerts Trio worked/rehearsed extensively with all of these composers personally and the result comes near to perfection!
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