 Ce Cd entend "rendre hommage à la contrebasse" en faisant fi des clichés auxquels cet instrument est associé : il s’agirait même de restituer son "histoire", de dévoiler les possibilités et les prouesses dont il est capable ailleurs que dans l’orchestre symphonique. Las ! On a affaire ici à une compilation sans unité aucune de morceaux, et même d’extraits de morceaux, à un salmigondis fait d’adaptations, de réécritures, de réharmonisations de pièces glanées dans un peu tous les genres (musique de chambre, musique de cinéma, Lieder de Schubert qui n’ont plus de Schubert que leur titre, et sont accommodés à la sauce jazzy, ou donnent lieu à des contorsions sans grand intérêt, mélodies religieuses…). Certaines autres pages sollicitées sont même carrément desservies, comme par exemple la "Pavane pour une Infante défunte" de Ravel, qui n’a, interprétée comme elle l’est ici, plus guère de subtilités : à partager le matériau musical de l’œuvre entre piano et contrebasse — cette dernière se chargeant en gros de la voix supérieure normalement confiée au clavier, ou redoublant parfois celle-ci, la poésie, les moirures de la trame s’évanouissent. Si Ravel a orchestré ensuite cette pièce, c’était pour en magnifier les couleurs et les reflets latents dans la version pour clavier, alors que la contrebasse contribue plutôt ici à banaliser la pièce ou (cela revient d’ailleurs au même) à lui conférer une surcharge sentimentale trop appuyée. Il en va de même de la mélodie "Beau Soir" de Debussy et de la célèbre "Élégie", destinée au violoncelle et au piano par Fauré. Piazolla, Chaplin, Mancini, Rachmaninov, etc…, revisités d’une manière ou d’une autre par la contrebasse, ne sont guère ici que des occasions pour meubler une soirée conviviale, ce qu’en dépit des intentions affichées, tout tend en fait, dans la notice, à suggérer. (Bernard Vincken)
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