Ivan Fischer boucle son cycle Brahms avec la si difficile Troisième. En était-il effrayé pour avoir tant attendu ? Dans une note liminaire, il affirme pourtant son admiration pour les dix mesures qui ouvrent l’œuvre et pour la complexité d’un parcours harmonique qui sera le vrai sujet de son interprétation si fouillée. Le peu d’ardeur rythmique qu’il met au long de sa lecture pourrait faire un peu vite accroire qu’il y pécherait par prudence, mais non. Eperdument lyrique, sa Troisième qui parfume ses sfumatos dans un orchestre somptueux, est à revers de tant d’autres, et expose avec une nostalgie sereine les allures de sérénade de l’Andante. Il la déploie entièrement dans des lumières de crépuscule encore clair, raffinant tout un univers de polyphonies et comme le faisait jadis Herbert von Karajan, tuilant ces successions de vastes mélodies qui parcourent les pupitres de l’orchestre. La balance sonore est inouïe, qui fait tout entendre dans le corps harmonique, et les tempos tous médians – le Poco allegro est emblématique – distille une poésie souvent étrange. Certain regretteront que la tension manque au final, mais sa coda si nimbée d’au-delà les consolera peut-être. Après le crépuscule, le tendre soleil qu’il infuse au long de cette pastorale qu’est la Seconde Sérénade séduira plus immédiatement les revêches, maintenant qu’Ivan Fischer et son orchestre soie et brocart nous gravent la grande Première Sérénade, qui ferait une belle coda à un cycle que le temps aura distendu au point de le rendre quasi invisible. (Discophilia - Artalinna.com) (Jean-Charles Hoffelé) Brahms dedicated himself to music that was pure and abstract, which ‘portrayed’ nothing: no stories, no travel epics, no visual impressions. But nonetheless the Third does possess a personal undercurrent. The main thread of all four movements is the little motief FA- F. With these three notes Brahms, the eternal bachelor, expressed his personal motto ‘Frei aber froh!’ - free but happy! It was a reaction to the musical signature F-A-E (‘Frei aber einsam’ – free but lonely) of his good friend the violinist Joseph Joachim. And despite all his aversion to the new rage of the symphonic poem, he delighted in the letter from Clara Schumann after she heard the symphony: ‘The opening movement depicts a delicious dawn ... the second movement an idyll, prayer in a small chapel in the woods, the flow of a brook, the rummaging of little beetles...’.
|