Ludwig van Beethoven (1770-1827)
Variations Diabelli, op. 120

May Phang, piano

Voici des Diabelli diablement théâtrales, et « romantiques » si on retient l’idée défendue par Charles Rosen que le romantisme est l’esthétique du fragment. Là où de grands anciens (Brendel en tête, en 1976) ont cherché la cohérence, le « fignolage des jointures entre les sections » (la phrase est de Brendel lui-même), May Phang nous offre une série de saynètes très caractérisées, à la fin parfois « espiègle » ou « humoristique » (piquée et piano). La modernité de l’œuvre est renforcée (on croit croiser, c’est vrai, Chopin, Brahms, Schumann ou Mendelssohn), et son regard en arrière (le tribut payé à Haendel ou Bach) un peu affaibli. Mais c’est surtout le tour de force formel accompli par Beethoven, cette sorte de « variation sur la variation » qui se sent moins, au profit de l’anecdote. Quant au surgissement de Leporello, façon humoristique de faire remarquer à Diabelli que son thème n’était peut-être pas si original que cela, il n’est presque plus qu’une péripétie parmi d’autres. Le résultat s’écoute avec plaisir dans les variations courtes ou peu éloignées du thème original. Je suis un peu plus réservé sur les variations longues et « sérieuses » dans lesquelles le thème est élargi, tordu dans tous les sens rythmiquement ou harmoniquement. Au total pour moi une version qui n’entrera pas dans la légende, mais moderne et agréable. (Olivier Eterradossi)