 Après une omniprésence dans le paysage musical de plusieurs siècles, depuis le Moyen-Âge, et après plusieurs apogées à la Renaissance, puis à l’époque baroque, le luth connaît un lent déclin dans la deuxième moitié du XVIIIème siècle, son timbre intimiste relégué au musée, notamment par la vogue de la harpe, de la guitare, et du pianoforte. S’il continue à être utilisé dans les ensembles de continuo puis de basse, il n’y a guère qu’à Naples qu’il va survivre en tant qu’instrument d’ensemble à cordes pincées, avec mandolines, mandoles et colasciones, grâce à des instrumentistes-compositeurs comme Calace ou Munier, et ce jusqu’au début du XXème siècle. Dans les pays de langue allemande, les amateurs continuent à l’apprécier, comme en témoigne le catalogue de Breitkopf & Härtel dans les années 1760, où l’éditeur propose plusieurs adaptations d’œuvres de Joseph Haydn. C’est qu’on n’écrit plus guère d’œuvres avec luth, même si Carl Stamitz et Wilhelm Rust continuent à l’utiliser dans des musiques de chambre, ou que des luthistes comme le bohémien Kohaut (1726-1784) font de la résistance. S’inspirant de cet usage courant au XVIIIème siècle, de la transcription, le jeune et très talentueux luthiste brésilien Vinicius Perez interprète ici, à côté d’une sonate originale de Kohaut et de variations de Scheidler (composées après 1787 sur un air du Don Giovanni de Mozart), deux très belles adaptations. D’une sonate pour clavecin de Haydn, dont la structure simple à 3 voix se prête tout naturellement à cette métamorphose. Puis, plus insolite, d’un des divertimenti de Mozart pour 3 cors de basset. Là aussi, contre toute attente, la nature essentiellement polyphonique du luth rend merveilleusement justice à l’œuvre du maître salzbourgeois, en clarifiant les harmonies de cette œuvre délicieuse. Ce premier CD de Vinicius Perez, au programme si original, est indéniablement un coup de maître. (Jean-Michel Babin-Goasdoué)
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