Josef Holbrooke demeure le génie maudit de la musique britannique comme le fut Rued Langaard pour la musique danoise : des originaux absolus, libres dans la marge, maudits par l’institution malgré leurs succès publics et l’admiration des lettrés, réfugiés dans leurs œuvres qui les rédimeront pour la postérité. C’est à peu prés entendu pour les Symphonies de Langaard, bien moins pour Holbrooke dont le génie orchestral est pourtant saisissant. Commencez donc le disque par son dernier opus, ce Corbeau (The Raven). Les auditeurs du Crystal Palace le découvrent un soir de 1900, conte noir inspiré par Poe, l’opus 1 d’un jeune homme qui n’a pas encore passé ses 22 ans. Sensation devant cet orchestre fuligineux, sombre, génialement composé qui distille un malaise. Des dames se seraient évanouies dit-on. En tous cas la carrière s’ouvrait devant le jeune compositeur. Il restera fidèle à Poe, proposant sa propre version des Carillons qui tient tête fièrement à celle de Rachmaninov, dressant le portrait de l’écrivain américain dans sa Première Symphonie. Le fantastique, l’étrange furent sa vraie nature. Et qui entendra ici "The Raven" dans la lecture crépusculaire et fantasmagorique qu’en délivre Horward Griffiths et son orchestre ne pourra être que saisi par l’art suggestif du compositeur : rien ne s’était vu en Albion de si sombre, de si prégnant, de si singulier. Le reste du disque illustre l’autre face, celle du compositeur adoubé, installé, qui sait aussi briller, cycle de variations habilement troussée ou Concerto pour violon bavard et jouissif, jouant des clichés avec une certaine ironie. Mais le vrai visage d’Holbrooke est tout entier dans le coup de maître de "The Raven". Puisse CPO poursuivre dans son exploration du gigantesque catalogue de cette figure majeure du renouveau de la musique britannique au XXe Siècle (Discophilia - Artalinna.com). (Jean-Charles Hoffelé) When the symphonic poem The Raven after Edgar Allan Poe celebrated its premiere in London in March 1900, the critics showered hymns of praise on this work so rich in unique orchestral colors and on its young composer Josef Holbrooke. It brought him his breakthrough and firmly established his reputation as an innovative and original contemporary composer. There are certainly many settings of Poe’s poem, but Holbrooke was the first composer who did not merely set the text but used it as the poetic basis for his first »Poem for Orchestra.« Holbrooke’s idiom was the musical language of the late nineteenth century obliged to the primacy of expression, and he enriched it with his constant quest for new tonal effects. In his orchestral variations on the beloved Scottish folk song »Auld Lang Syne« he again displays his extraordinary gift for employing his absolutely inexhaustible inventive talent and fine feeling for harmony in order to endow simple song forms with subtle expressive variety. And his only violin concerto, The Grasshopper, radiates carefree lightness and is brimming with rhythmic wit – as the title itself suggests.
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