Morton Feldman (1926-1987)
Patterns in a Chromatic Field, pour violoncelle et piano

Mathis Mayr, violoncelle
Antonis Anissegos, piano

Composition ambitieuse parmi d’autres - près de 80 minutes ; Morton Feldman est un habitué des formats longs - Patterns In A Chromatic Field, comme souvent chez le compositeur, met les capacités mnésiques de l’auditeur au défi. Au défi de reconnaître au bout d'une dizaine de minutes, cette structure fragmentée, répétée certes, mais à une hauteur ou sur une rythmique modifiée, altérée par de subtiles évolutions le long de l’écoulement des mesures. Feldman écrit une musique ancrée dans le présent, le hic et nunc des psychologues et autres promoteurs de pleine conscience : impossible de prédire précisément le futur ou de se rappeler suffisamment le passé - ça ressemble, mais ce n’est pas exactement ça… Il génère ainsi, par sa musique au temps statique-mais-non-figé, une sorte de transe méditative, une hypnose auditive, telle un bain de mercure où flotter dans un temps dissous. Son attrait pour l’art visuel, pour l’impression rétinienne laissée par ces tapis du Moyen-Orient qu’il admirait, avec leurs motifs répétés de façon imparfaite (car faits à la main), avec leurs disruptions (le mot est à la mode aujourd’hui, mais la chose n’est pas neuve) volontaires, ont durablement influencé l’esthétique de Feldman. Chez lui, non seulement la répétition est à l’avant-plan, mais aussi la récurrence : des groupes de structures antérieures réapparaissent plus tard, légèrement tronquées. Un régal. (Bernard Vincken)

Morton Feldman's Patterns in a Chromatic Field is a major composition, not only in modern American music but in 20th-century music per se. The composer plays with the musical memory of his recipients and thus creates timeless spheres: In minimally varying patterns, the listener experiences a trance-like avant-garde event in which past, present and future cancel each other out. Patterns in a Chromatic Field is based on the principle of differentiation and repetition. The composition functions like a still life, using the color variations of Middle Eastern rugs as a basis: Even a pattern that appears to repeat itself exactly is actually slightly different in its iterations because of slight changes in hue. In his piece for piano and violoncello, Morton Feldman now creates a large-scale auditive pattern whose sound aesthetics from the layers of notes is no less than a transformative and meditative experience of music. With Antonis Anissegos on the piano and Mathis Mayr, this recording unites two performers who not only are excellent instrumental players but also feel at home in electronic music – a fact that is of benefit to their version of Morton Feldman’s minimalist soaring tonal architecture. Anissegos and Mayr create a detailed and intimate sound quality which can be regarded as referential in its antithesis of the ‘dramatic’.